La lire est-elle au bord de l’effondrement ?

La lire est-elle au bord de l’effondrement ?

Pendant des mois, la livre turque a été la devise la plus ennuyeuse des marchés émergents. Les investisseurs s’attendent à une séance de gymnastique sur la monnaie à l’approche d’élections importantes.
Les traders s’attendent à ce que la volatilité fasse son retour et que la lire s’affaiblisse, sans se soucier de l’avenir du règne de deux décennies du président Recep Tayyip Erdogan. La victoire de l’opposition dans une course serrée ne change pas non plus la vision. La lire turque devrait chuter de 25 % par rapport au dollar d’ici la fin de l’année, en raison des options, avec une probabilité de près de 60 %.
Les autorités turques ont créé des instruments supplémentaires pour soutenir la lire face à la politique non conventionnelle d’Erdogan, qui consiste à réduire les taux d’intérêt bien en dessous de l’inflation. L’année dernière, la banque centrale a dépensé 108 milliards de dollars via des interventions détournées pour contrecarrer les effets d’une politique monétaire nonchalante. Au cours des six derniers mois, cela en a fait la monnaie la plus stable du monde en développement.

Perspectives sur la longévité politique d’Erdogan

Cristian Maggio est le responsable du portefeuille et de la stratégie ESG chez TD Securities. Selon lui, un certain nombre de défis structurels restent non résolus. S’ils ne sont pas résolus rapidement, ils se traduiront par une lire vacillante à long terme. Il ajoute que la poursuite du leadership d’Erdogan coïncidera presque certainement avec l’effondrement sans fin des fondamentaux de la Turquie et, à terme, avec une instabilité financière.
Emre Peker est le directeur Europe d’Eurasia Group. Il affirme qu' »en répondant aux préoccupations économiques des électeurs », Erdogan est susceptible de se maintenir sur le trône. L’alliance de l’opposition montre son incapacité à présenter une alternative viable à Erdogan. Deux décennies de règne de son AK Party ont fait passer la probabilité de sa réélection de 55% à 60%.
Le 13 février, l’alliance des six partis choisira son candidat pour affronter Erdogan. L’opposition pourrait retravailler la stratégie des taux bas prônée par Erdogan si elle accède au pouvoir. Elle aurait ainsi la possibilité de regagner les investisseurs internationaux qui ont fui le pays ces dernières années en raison de la chute de la lire à des niveaux historiquement bas et de la montée en flèche de l’inflation. Pourtant, quel que soit le résultat, l’énorme déficit de la balance courante de la Turquie, le gonflement de sa dette extérieure et la faiblesse de ses réserves sont autant d’obstacles à l’appréciation de la monnaie turque.